La presse parle du coffret
Ladislas Starewitch !
* L'avant scène cinéma - 624 juin 2015 - p 134
* Bernard Génin dans l'émission de Michel Ciment Projection privée sur France Culture, le 13 juin 2015.
http://www.franceculture.fr/emission-projection-privee-bruno-podalydes-2015-06-13
Le conseil de la semaine 49'50 par Bernard Génin (Karel Zeman et Ladislas Starewitch)
Bernard Génin parle du coffret Starewitch : 52'28 à 58'50.
Le texte de l’émission :
« Michel Ciment : Le conseil de la semaine, ce sont deux événements liés à l’animation cet art merveilleux dont on ne parle pas assez, et pour évoquer ces deux événements j’ai demandé à Bernard Génin qui est un des grands spécialistes français de l’animation qui a écrit des livres sur le sujet de nous parler d’abord de Karel Zeman ce grand auteur tchèque dont plusieurs films sont en salles, trois films de lui, et puis ensuite d’un coffret « Ladislas Starewitch » 496 minutes dont on parlera plus longuement.
…
Michel
Ciment : Alors Ladislas Starewitch, donc, cinquantième anniversaire de
sa mort, il est né en 1882, il est mort en 1965. Voici cinq DVD proposés par
Doriane Films donc dix-neuf films réalisés entre 1920 et 1937, et je le disais
cinq-cents minutes de visionnement avec des films, euh, L’Homme
des confins, Les Fables de Starewitch
d’après
Bernard Génin : Absolument. Donc Starewitch c’est gigantesque, c’est énorme, c’est un des grands précurseurs de l’animation. Il est contemporain de Méliès et d’Emile Cohl, et il a une vie absolument incroyable puisque, donc il est polonais d’origine, il gardera sa nationalité polonaise toute sa vie, mais il va être élevé en Lituanie à Kovno par ses grands-parents, par deux tantes et deux oncles qui sont des passionnés d’entomologie donc il va très tôt dans sa jeunesse faire la chasse aux papillons, il va faire du théâtre, il va faire de la peinture, de la caricature, il est doué pour tout. Et un jour il découvre les films d’Emile Cohl et il se dit, puisque c’est possible d’animer des petits dessins, ça doit être possible d’animer des objets aussi. Et il voulait reconstituer la lutte de deux cerfs-volants, deux insectes, et il essayait de les filmer et les insectes se figeaient dès qu’il allumait ses projecteurs. Alors un jour il a eu l’idée d’utiliser deux insectes morts, il a mis des petites boulles de pate à modeler aux charnières, aux articulations et il a filmé la lutte de deux males qui se battaient pour une femelle, et le film a été projeté, le tsar Nicolas II l’a vu, l’a félicité. On a cru qu’il avait dompté les insectes, il avait donc une connaissance de la vie des insectes incroyables. La suite, donc ça c’est en 1910, il avait trente ans, 28 ans et en 1920 il part en France, il s’installe à Fontenay-sous-Bois, c’est là qu’il va faire toute sa carrière, il a quarante ans quand il arrive en France. Et à Fontenay-sous-Bois il va réaliser ses chefs-d’œuvre dont le fameux Roman de Renard qui a fait le tour du monde, qui est vraiment un chef-d’œuvre ça, vous pouvez le trouver, il est en vente partout en DVD. Et le coffret qui parait aujourd’hui est capital puisque c’est le complément de ce long métrage célèbrissime, là ce sont les courts métrages. Et dans les courts métrages on trouve des merveilles qui ont émerveillé Terry Gilliam, quand il a vu certains courts métrages il a dit mais c’est forcé : Starewitch a influencé Švankmajer. Quand Wes Anderson
Michel Ciment : Švankmajer, autre
Bernard Génin : réalisateur tchèque
Michel Ciment : tchèque, La possibilité du dialogue
Bernard Génin : La possibilité du dialogue et puis les longs métrages où on sent le surréalisme de Švankmajer, bien ce surréalisme il est présent dans certains courts métrages de Starewitch. Dans Fétiche Mascotte il y a des scènes absolument incroyables, qui évoquent, moi je vais même plus loin il y a des scènes avec des insectes, des balais,
le diable, des personnages en ficelle découpée qui m’ont fait penser, moi, à la bacchanales de Viridiana pour vous dire l’influence surréaliste, et Ado Kyrou d’ailleurs cite Starewitch dans son , « Le surréalisme au cinéma », et donc voilà,
[1] Fétiche 33-12 est en fait un DVD distinct de L’Homme des confins.
* Agathe de Lastyns sur le site Agathon.
http://www.lelitteraire.com/?p=15565
by27 mai 2015 · 10 h 50 min
Ladislas Starewitch, 1882–1965, cinquantième anniversaire
Œuvres
choisies d’un génie
Les
lecteurs qui ne connaissent pas encore Starewitch (1882–1965), l’un des
rares génies de l’animation, n’aurons sans doute jamais une occasion
meilleure que ce coffret de découvrir son œuvre – admirée, soit dit en
passant, par Terry Gilliam, Jan Svankmajer, les Frères Quay, Tim Burton et
maints autres cinéastes qui s’en sont copieusement inspirés.
Restaurés et réédités sous la direction de Léona Béatrice
Martin-Starewitch (la petite-fille du cinéaste) et de François Martin, se
trouvent réunis ici la plupart des chefs-d’œuvre de ce maître. Certains des
films choisis pour le coffret sont des plus célèbres, comme Les
Fables de Starewitch, d’après La Fontaine, ou la série
des aventures du chien Fétiche, dont la superbe version intégrale de Fétiche Mascotte, intitulée Fétiche
33–12 (ces chiffres renvoient à l’année où le film fut réalisé
et à celle où son montage initial a été reconstitué). D’autres sont méconnus,
mais dignes de la réputation de leur auteur, notamment la série Nina
Star (c’est le pseudonyme de Jeanne, l’une des filles du
cinéaste) et Amour
noir et blanc où apparaissent, mués en marionnettes, Chaplin,
Mary Pickford, Tom Mix et d’autres gloires du cinéma muet.
Ce qui frappe le plus le
spectateur actuel, chez Starewitch, c’est l’inventivité qui semble inépuisable
– qu’il s’agisse de créer des marionnettes d’une diversité phénoménale,
ou de mêler les prises de vue réelles, l’animation et le dessin animé –
et qui se combine avec une palette émotionnelle des plus étendues. Le mièvre
en est exclu ; le mélodramatique ne s’y manifeste que rarement, grâce à
quoi aucun de ces films n’apparaît comme obsolète ; l’humour est omniprésent,
se combinant ou alternant avec toute la gamme qui va du touchant au poignant.
Cette richesse de la forme et du contenu destine la plupart des films à un
public adulte, le seul capable d’en goûter toutes les qualités, même si
l’on peut parier que bon nombre d’enfants vont s’en régaler à leur manière.
A ce propos, je vous suggère de visionner le coffret d’abord entre
adultes, pour juger de ce qu’il conviendrait de montrer aux petits : les
plus sensibles pourraient être heurtés, par exemple, par l’aspect visuel
assez effarant des insectes de Starewitch (volumes 1 et 2) ou bouleversés
par le contenu du Lion devenu vieux (volume 3), d’après La Fontaine
– sans doute le plus poignant et le plus désabusé des chefs-d’œuvre du
cinéaste.
Mon seul regret à propos de ce coffret qui regorge de trésors,
bonus compris, c’est qu’on n’y trouve pas le sublime Roman
de Renart, que Doriane Films avait édité en 2000. A quand
une nouvelle édition restaurée ?
agathe
de lastyns
Ladislas
Starewitch, 1882–1965„ cinquantième anniversaire, coffret de
5 DVD,
Doriane Films, mai 2015, 496 min.
* Sébastien
Bazou, pour l’association Artefact.
Voir l’article sur le site d’Artefact (avec les illustrations). http://www.artefake.com/LADISLAS-STAREWITCH.html
Sébastien Bazou, pour l’association Artefact.
Les rêves de
l’imaginaire.
Ladislas Starewitch est né
à Moscou en 1882. En réalisant lui-même ses premiers films d’animation, il
est aussitôt remarqué par les premiers producteurs de cinéma à Moscou.
Alexandre Khanjonkov va lui installer un studio dans la capitale du cinéma
russe et lui faire tourner aussi des films avec de vrais acteurs, parmi les plus
grands du moment. Starewitch développe tout de suite une conception novatrice
du cinéma par rapport aux premières tendances qui se distinguaient peu du théâtre
filmé. Il réalise des trucages, utilise des caches, rompt le rythme du récit ;
son style est tout de suite identifiable, pas seulement dans les films
d’animation.
En 1914, devenu un des plus
grands réalisateurs à Moscou, Starewitch prend son indépendance et devient
son propre producteur. Mais les événements s’enchaînent : la guerre
qui commence en août 1914 entraîne de graves difficultés en Russie, la Révolution
et une nouvelle guerre civile. Il prend, comme nombre de réalisateurs et
acteurs russes, le chemin d’un exil plus lointain.
Arrivé en France à la fin
de 1920 il s’installe à Paris avec sa femme et ses deux enfants, Irène et
Jeanne. La communauté cinématographique russe émigrée devient très présente
dans les studios de la banlieue parisienne à Joinville-le-Pont ou
Montreuil-sous-Bois et c’est pour des producteurs arrivés peu avant lui que
Starewitch commence à travailler surtout comme caméraman. Mais très vite il
va recommencer à tourner ses films avec des marionnettes animées jusqu’à ne
plus se consacrer qu’à cela. En 1924 il achète une maison à
Fontenay-sous-Bois où il installe sa famille et son studio. C’est là qu’il
va rester jusqu’à la fin de ses jours en février 1965 et qu’il va tourner
tous ses films. Le succès revient très vite et il vit très bien développant
une oeuvre très personnelle diffusée dans le monde entier. L’apogée de sa
carrière se situe certainement dans l’entre-deux-guerres. Pour l’essentiel
il travaille seul, aidé seulement par Irène qui va rester toute sa vie la
collaboratrice de son père.
Tous les types de
marionnettes utilisés par L. Starewitch sont présents dans ces films, les
insectes de ses débuts en 1909, des mammifères plus volumineux dont le visage
est couvert de peau de chamois qui permet toutes les expressions du visage (Le
Lion et le moucheron), et des marionnettes anthropomorphes (La
Petite Parade). Des procédés techniques, comme la surimpression,
permettent de mêler sur la même image des marionnettes animées et un acteur
humain. Ses films sont des adaptations de textes connus de La Fontaine souvent,
de Goethe pour Le Roman de Renard (son
chef-d’œuvre) ou bien des scénarios originaux conçus très souvent de la même
façon : un préambule joué par des acteurs définit une situation, un
problème en fait, puis le film bascule dans le rêve ou bien le réalisateur /
créateur donne la vie à un objet inanimé. Les marionnettes deviennent les
personnages du film et trouvent une solution heureuse au problème posé. De nos
jours, Starewitch est la référence de Tim Burton (pour ses films
d’animations : Vincent, The
Nightmare before Christmas et Corpse bride)
et a énormément influencé Les Studios Aardman, responsables des Wallace et
Gromit.
Les DVD
1- Les Contes de l’Horloge Magique (Trois courts-métrages
des années 1920, regroupés sous un programme d’une heure.)
- La
petite chanteuse des rues (1924) est le moins réussi du
lot. C’est avant tout un film de fiction où intervient l’animation d’une
marionnette représentant un singe, qui se substitue au vrai animal. La naïveté
affichée, allié à un sur jeu des acteurs rend l’histoire sans grand intérêt.
A noter toute fois une belle séquence d’animation en surimpression où le
singe animé « perce » le secret d’un coffre fort.
- La
petite parade (1928) est un film choral d’une remarquable
construction dramatique. Tout commence dans une chambre d’enfant où les
jouets s’animent une fois que les être humains sont partis (en 1995, John
Lasseter reprendra cette idée pour son film d’animation Toy
story). Le personnage de Casse-noisette est présenté, ainsi qu’un
soldat de plomb, qui vont se disputer très bientôt les faveurs d’une petite
danseuse. Mais avant cela, le diable fait irruption d’une boite à mystère et
va effectuer des tours de magie (des diableries) par la transformation
d’aliments et d’objets (noisette, huître, banane, cigare, bouchon) en
danseuses (magnifiques séquences). Mais ce qui attire l’œil des deux rivales
c’est une petite danseuse sur sa boîte à musique ! Vient alors une scène
dans les bas fonds de la maison en compagnie des rats, qui prennent d’assaut
« les beaux quartiers » et tentent de franchir un château miniature
avec l’aide du diable pour récupérer la danseuse. Le petit soldat ayant
valeureusement défendu la forteresse se retrouve jeté à la mer par une main
humaine (superbe séquence maritime). Mangé par un poisson, il retournera à
son point de départ pour rejoindre sa danseuse dans un feu de cheminée. Ils
partirent en fumée mais ensemble et pour toujours !
- L’horloge
magique (1928) est un beau conte médiéval de prince et de
princesse. Dans un atelier d’horloger (filmé avec de vrais acteurs) une
petite fille finie les derniers préparatifs aux automates d’une horloge et se
rêve princesse. L’horloge, soudain, prend vie et nous entraîne dans un monde
d’enluminures. Se déroule sous nos yeux émerveillés l’histoire d’un
chevalier valeureux et de sa princesse en lutte avec un mystérieux chevalier
noir qui s’avère être la mort ! La petite fille interviendra dans ce
monde imaginaire pour mieux s’y replonger par la suite et faire corps avec la
légende.
Avec ces deux derniers films,
Starewitch impose un monde de féerie remarquablement réalisé et mis en scène.
La finesse de ses marionnettes, la beauté de ses décors, la précision de ses
animations ; donnent lieu à des séquences inoubliables comme le combat
avec le dragon, la danse des fleurs où la capture de Nina dans la main d’un géant
(plusieurs années avant que King
Kong n’attrape Fay Wray).
2- Le monde magique de Ladislas Starewitch
- Le rat
de ville et le rat des champs (1926) est une belle
illustration adaptée de Jean de la Fontaine, caricaturant les soirées
mondaines parisiennes.
- Le lion devenu vieux (1932) continue
d’explorer les expressivités animales (portées à leur comble dans Le roman
de Renard). Lion, taureau, bouc, chat, singe, hibou, âne, cheval et mouche !
sont de la partie.
- Fétiche
Mascotte (1933) est un film sonore qui mélange prises de
vue réelles avec acteurs et animations. Un enfant demande à sa mère une
orange qu’elle ne peut lui offrir. Elle verse une larme qui tombe sur un
nounours en court de confection et qui se transforme en cœur. La peluche
« Mascotte » prend vie. Des jouets sont emballés, puis s’évadent
lors d’un transport (John Lasseter dans Toy Story 2
reprendra la même idée). Après bien des péripéties, Mascotte finit par
retrouver son chez soi et offre une orange au petit garçon. Ce court est animé
assez grossièrement, mais l’histoire a du charme.
- Fleur de
fougère (1949) est un conte fantastique où trois générations
sont représentées (le grand père, la mère et le fils). C’est une mise en
abyme de l’univers de Starewitch, qui fait dire à un de ses personnages,
qu’il y en a assez des histoires de La Fontaine ! Ainsi est proposé à
nos yeux la légende de la fougère magique, qui exauce tous les vœux de celui
qui la cueille. Jeannot, le jeune enfant part à sa recherche dans une forêt
protégée par des arbres qui marchent (Peter Jackson reprendra cette idée pour
le 2ème volet de sa trilogie Le Seigneur des Anneaux).
La nature s’anime, et Jeannot se voit devenir prince et croise tous les
personnages des contes les plus connus (le chat botté, la cigale et la fourmi,
cendrillon...).
3- Le Roman de Renard (1930) est l’unique long métrage de
Starewitch : un chef-d’œuvre du film de marionnettes.
Cette fable sur les méfaits
d’un renard peu scrupuleux a valeur d’universalité. Avec le respect propre
au régime monarchique, et eut égard au rang de chacun, chaque personnage
occupe sa place avec dignité. Lapin et Coq sont simples sujets du royaume, Ours
protège la famille royale, tandis que Lion et Lionne trônent au plus haut
rang. Parmi cette société ô combien structurée et où chacun obéit sans
broncher aux ordres du roi, un trublion sème pourtant la zizanie parmi les
habitants, dupant ici un marchand de poissons, s’obstinant là contre le Loup,
ou jouant un bien mauvais tour à l’épouse du Coq. Chaque coup est fomenté
avec une belle ingéniosité... d’où cette réputation nullement usurpée du
renard rusé.
Les « ciné
marionnettes » du Roman de Renard
ont une structure métallique ou une ossature de bois revêtue de peau de
chamois. Appliquée humide, la peau de chamois colle à l’ossature et en séchant
donne l’illusion de la peau, il est ensuite possible de plisser cette peau à
volonté pour donner diverses expressions aux visages des personnages. Les yeux
sont en verre, ceux-là mêmes qu’utilisent les taxidermistes... Les oreilles,
la langue, les paupières sont en peau de chamois. Divers matériaux sont utilisés
pour donner du volume comme le coton, la paille, la mousse.
Elégance des dialogues,
structure ultra-classique, efficacité de la narration, technique de la stop
motion à son apogée (aux côtés de l’oeuvre de Ray HARRYHAUSEN), tout
atteint ici un niveau de perfection absolu, à mille lieux des films en images
de synthèse d’aujourd’hui, trop maîtrisés pour être totalement
convaincants. La magie ineffable d’un récit intemporel (le film s’ouvre,
tel un conte, par un livre où les personnages sont tour à tour présentés) et
une mise en scène magistralement théâtrale, font du Roman
de Renard un classique de l’animation hors du temps.
A voir :
Les
Contes de l’Horloge Magique. DVD disponibles chez les Editions
Montparnasse. Et Doriane
Films.
STAREWITCH,
50ème ANNIVERSAIRE. Coffret 5 DVD rassemblant 19 œuvres d’animation. DVD
disponible chez Heeza.
Auteur : Sébastien
BAZOU
Mise à jour effectuée le :
7 mai 2015.
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